Les appartements du Golden Square Mile
| Type | Agrandissement et réaménagement complet de 4 appartements |
| Lieu | Ville-Marie |
| Année | 2025 |
| Superficie | 12 000 pc |
| Photos | Maxime Brouillet |
| Créateurs d'objets et de mobilier | Alex Joncas - Baddi Raban - Clara Jorisch - Edith Sevigny Martel - Ema Ceramics - Atelier Fomenta - Fusion F - Igor Zigor - Jérémy Le Chatelier - Jérémy Paguet - I don't know Marco - l'Autre Atelier - Lambert & Fils - Le Tenon & La Mortaise - Les objets Raymond Raymond - MDT Mobilier - Myco Audio - Paul Pointet - Harrison Fun - Reggy - Sangaré - Sauvé Morissette - Small Medium Large - Studio Super Sunday - Studio Botté - Studio JETA - Verre d'Onge |
Au pied du Mont-Royal, là où les rues du centre-ville rencontrent encore l’empreinte du passé, s’élèvent les Appartements du Golden Square Mile. Leur nom évoque le quartier qui les accueille, autrefois symbole éclatant de la prospérité montréalaise. Entre 1850 et 1930, cette enclave abritait les grandes fortunes du pays et formait un ensemble architectural d’une rare cohérence, composé de demeures victoriennes, néoclassiques et baronniales écossaises. Ces résidences, témoins d’une époque de faste, dominaient alors un paysage urbain façonné par l’élite industrielle et financière du pays. Mais au fil du XXe siècle, le quartier s’est transformé : l’essor du centre-ville, la modernisation accélérée et l’expansion institutionnelle ont peu à peu effacé cette trame historique. Plus de 70 % des bâtiments d’origine ont disparu, ce qui confère aujourd’hui une valeur précieuse aux rares édifices qui ont traversé les décennies.
C’est dans cette histoire mouvementée que prend racine le projet, issu de la restauration de deux maisons unifamiliales datant de la fin du XIXe siècle. Nichées sur la rue Stanley, ces demeures victoriennes avaient connu un destin typique au quartier : converties en bureaux dans les années 1980, elles avaient été profondément altérées par des interventions maladroites. Occupées brièvement, elles furent ensuite laissées à l’abandon pendant plus de trente ans, jusqu’à ce qu’un couple du voisinage, sensible à leur valeur patrimoniale, décide en 2018 de leur offrir une nouvelle vie.
Animés par leur passion pour l’art et l’architecture contemporaine, les propriétaires souhaitaient rendre à ces bâtiments leur vocation résidentielle tout en y créant quatre logements de grande qualité. Le projet se structure autour d’une intention claire : restaurer le caractère historique des maisons tout en permettant une densification réfléchie du site. Le volume donnant sur la rue retrouve donc ses attributs d’origine, restaurés grâce au savoir-faire méticuleux d’artisans locaux, tandis qu’un agrandissement arrière propose une architecture résolument contemporaine. Le fil conducteur du projet se tisse autour du langage de la courbe, emprunté aux escaliers anciens qui se retrouvaient au cœur des maisons d’origine, et réinterprété dans les détails architecturaux, créant une continuité subtile entre héritage et modernité.
La rencontre des deux époques se révèle dans la conservation du mur extérieur arrière en brique, qui constitue une véritable charnière entre passé et présent. Devant lui s’ouvre une cour intérieure, traversée par un mur rideau vitré qui filtre la lumière et organise la transition entre les volumes historiques et l’agrandissement contemporain. Aux étages supérieurs, les salons s’épanouissent sous une lumière abondante, captée par de vastes fenêtres et puits lumineux pyramidaux qui ponctuent la toiture d’éclats inattendus.
L’escalier commun, pièce maîtresse du projet, se déploie comme une sculpture monumentale. Ses courbes élégantes et ses marches ajourées laissent circuler la lumière, conférant à cet espace une légèreté remarquable. L’aménagement d’une nouvelle entrée commune en façade avant ainsi que l’intégration discrète d’un ascenseur permettent désormais à l’ensemble des espaces intérieurs d’être pleinement accessibles aux personnes à mobilité réduite.
À l’arrière, la façade contemporaine attire le regard par sa blancheur lumineuse et son traitement graphique. Habillée d’une résille aux formes arrondies, ses panneaux ajourés inspirés des géométries accidentées des façades d’époque créent des jeux de lumière changeant tout au long de la journée. Cette peau filtrante offre à la fois intimité et ouverture, tout en prolongeant les espaces intérieurs vers l’extérieur.
Fidèle au désir des propriétaires d’inscrire l’art au cœur du quotidien, le projet s’est temporairement transformé en espace d’exposition lors de la prise de photos. Chaque logement a accueilli du mobilier conçu par des artistes et designers québécois, dont les pièces, intégrées au langage architectural, prolongent les lignes, enrichissent les perspectives et accentuent la poésie des espaces.